L’organisation internationale de la francophonie est une organisation intergouvernementale qui annonce pour 2025 regrouper 93 états ou gouvernements. Cette organisation a émergé dans le contexte du processus de décolonisation des anciens territoires de l’empire colonial français. Elle a officiellement été créée le 20 mars 1970 à Niamey.
Ayant son siège à Paris, son budget, très faible (68 millions d’euros), étant principalement abondé par la France, elle est, de ce fait, un élément du pouvoir d’influence de l’Etat français.
Aux temps pas si lointains de la Françafrique, cette situation ne posait pas de problèmes. Aujourd’hui, alors que les huit pays francophones de l’Afrique de l’Ouest ont voulu, chacun à sa manière, se distancier des intérêts français, la question du rôle et du fonctionnement de la francophonie se pose.
Le rôle et l’objet de la francophonie, c’est de regrouper tous les locuteurs du français. Ils seraient aujourd’hui entre 300 et 350 millions dans le monde et les démographes nous disent qu’ils seront probablement 700 millions en 2050.
La question se pose régulièrement : faut-il abandonner le français au profit des langues régionales ou nationales ? La réalité montre, qu’en fait, les deux peuvent être développées en même temps. En France même, au début du XXème siècle, les enfants, surtout à la campagne, qui arrivaient à l’école, n’avaient pas pour beaucoup la langue française comme langue maternelle. Ce fut, pendant plusieurs décennies, le rôle des instituteurs d’apprendre et de vulgariser le français. Après quelques lustres de concurrence entre le français et les langues régionales, il est admis aujourd’hui que l’étude des langues régionales, le breton, l’alsacien, l’occitan, le corse…, n’est pas un obstacle à la bonne étude du français.
Dans ces conditions, quel serait l’intérêt pour les pays francophones d’Afrique de l’Ouest, et même d’Afrique tout court, d’abandonner une langue dont les démographes nous disent qu’elle sera en 2050 l’une des cinq ou six langues les plus parlées au monde ? Un écrivain algérien qui écrit en français répondait : » Le français ? C’est une prise de guerre ! » Les pays francophones d’Afrique pourraient ainsi répondre : Le français ? C’est une prise des anciens colonisés !
Mais alors, quid de la francophonie officielle et des « instituts français » que l’on retrouve un peu partout ? Le mot « institut français » est ambigu : il peut vouloir dire « institut de la France » et aussi « institut de la langue française ». En réalité, les instituts français, sont financés principalement par la France et leur personnel est payé par la France. Ils sont donc, à l’évidence, un élément du pouvoir d’influence de l’Etat français et c’est cela que les Africains n’acceptent plus.
Il convient donc de réfléchir à la création de « Maisons francophones » financées dans leur construction et leur fonctionnement par chacun des états africains candidats, qui auront pour objet à travers la littérature ou la musique, le développement de la langue française telle qu’elle est parlée aujourd’hui dans le pays. En parallèle, les gouvernements devront se soucier de créer, à la campagne, des écoles maternelles en nombre suffisant pour que les enfants des paysans n’aient pas, dès le plus jeune âge, trois ans de retard sur les enfants des villes qui, pour beaucoup, fréquentent l’école maternelle.
Ces « Maisons francophones » créées dans plusieurs pays pourront se regrouper dans une nouvelle francophonie qui pourrait s’intituler « collectif (ou ligue) des maisons francophones », dont le siège serait en Afrique (à Dakar ?), qui serait ouverte à tous les francophones du monde entier. ET, pour être plus près du citoyen de base, l’adhésion pourrait être ouverte aux villes ou autres petites collectivités territoriales.
La défense et l’enrichissement de la langue sont actuellement confiés à « l’Académie française » dont le siège est lui aussi à Paris. Sur cette question également, il pourra être créée une « Académie francophone » qui finira par éditer un dictionnaire à destination de tous les francophones qui sera moins influencé par le français tel qu’on le parle en France.
Cette démarche permettra de sortir de l’ambiguïté du mot français et elle permettra aussi à tous les francophones, et notamment aux Africains, d’être fiers de leur langue, celle qu’ils parlent tous les jours entre eux lorsqu’ils ne sont pas dans une conversation entre membres de la même ethnie.
Rédacteur : François SALLES
Crédit photos : Francophonie